Vertumne et Pomone

Ranc Vertumbe et Pomone

Ranc Jean

(Montpellier, 1674 – Madrid, 1735)
Vers 1710-1722
Huile sur toile
171,3 × 119,5 cm
inv. 64.3.1

Provenance : achat de la Ville de Montpellier, 1964.

Historique : Paris, hôtel Drouot, vente publique, 30 janvier 1933, n° 18 ; Paris, galerie Wildenstein ; acheté à cette galerie par la Ville de Montpellier après retenue en douane par l’Etat, 1964.

 

LOCALISATION

C’est en France, avant son départ pour la cour du roi d’Espagne Philippe V, petit-fils de Louis XIV, que Ranc peignit son chef-d’oeuvre : Vertumne et Pomone. 
Ovide raconte dans ses Métamorphoses (XIV) comment la nymphe Pomone, qui fuyait les dieux champêtres et leur violence virile, fut séduite par Vertumne, amoureux d’elle. Il prend l’apparence d’une vieille femme pour l’approcher et plaider la cause de l’amour. Il lui montre l’heureuse union d’un orme et d’une vigne couverte de lourdes grappes, et lui raconte ensuite l’histoire d’Anaxérète, princesse de Chypre, qui dédaigna l’amour d’Iphis, jeune homme de condition modeste. Désespéré, le jeune homme se pendit. Voyant passer à sa fenêtre le cortège funéraire du malheureux, Anaxérète au coeur de pierre est changée en statue de marbre par Vénus.Écoutant ce récit, la belle Pomone baisse la garde et se laisse séduire.


Le style de Ranc, qui est à son meilleur, porte la marque de Hyacinthe Rigaud (1659-1743) : longs doigts fuselés, visages ovales stylisés, draperies en coup de vent. La mode du portrait travesti se propageait alors en France par l’entremise de Rigaud, de Nicolas de Largillierre (1656-1746) et de Jean Raoux (1677-1734). Cependant, l’idéalisation du visage de Pomone incline à penser que nous ne sommes pas devant un portrait, mais bien face à un sujet mythologique, traité sur le ton badin de la scène de genre.

L’influence nordique est sensible dans l’exécution fine, le clair-obscur froid et le contre-jour, à la manière d’Adrian van der Werff (1659-1722), artiste très renommé. Ranc intègre le goût précieux hollandais à une composition de grand format, d’une emphase élégante plus française. 


Le coloris acidulé où scintillent le jaune citron et l’orangé, le clair-obscur efficace, la douceur attendrissante de la vieille femme, le visage altier mais d’une écoute attendrie de la nymphe sont d’un effet hautement séduisant. 
L’atmosphère crépusculaire et la qualité des regards entre Vertumne et Pomone rappellent que ce tableau est contemporain des Fêtes galantes de Watteau.